Télécharger le logoEn Côte d’Ivoire, Aristide Kouamé considère qu’il est témoin de son temps. L’artiste, âgé de 28 ans, utilise des sandales en plastique et des tongs usagées qui ont été rejetées par l’océan comme matière première pour ses œuvres. Une démarche écologique et artistique.
La création d’œuvres d’art à partir de sandales et de tongs recyclées est le défi du jeune artiste ivoirien qui combat la pollution marine.
« Je suis un artiste qui s’intéresse depuis peu à l’écologie parce que je suis dans le recyclage. Je récupère des tongs restées au rebut que j’utilise pour en faire des oeuvres d’arts », explique Aristide Kouamé dans un entretien avec ONU Info.
Il raconte être venu au recyclage « parce que c’est un sujet d’actualité qui touche mon temps, mon époque ». « En tant qu’artiste je me considère comme un témoin de mon époque. Donc c’est comme si je décrie l’histoire pour montrer aux futures générations que nous étions confrontés à un moment aux problèmes liés à l’écologie », ajoute-t-il.
Quand il était très jeune, il aimait dessiner et a développé sa fibre artistique. Il est entré par concours à l’Ecole nationale des Beaux-arts d’Abidjan. « Mon travail est tout un processus. C’est toute une démarche artistique », dit-il.
Le combat d’Aristide Kouamé, qui est aussi enseignant en art plastique, est de débarrasser les océans de ces tongs et sandales en plastique qui jonchent les rives de l’océan Atlantique dans son pays la Côte d’Ivoire. Les ramasser, pour lui, c’est ôter un poids lourd à la nature, lui enlever quelque chose qui dérange ses belles plages parce qu’il n’aime pas les voir sales. Il collectionne régulièrement des centaines de sandales en plastique échouées sur la côte à Abidjan.
« Je vais les récupérer à la plage parce que je me dis que cela dérange ces plages », dit-il. Il est souvent pris pour quelqu’un de bizarre, suscitant la curiosité des gens lorsqu’il collecte ces tongs rejetées par l’océan. « Généralement le regard des gens sur moi quand je vais ramasser les tongs, automatiquement on me prend soit pour un marginal soit pour quelqu’un de particulier qui va les revendre pour du business, ou encore pour un fou ».
Une fois dans son atelier, il désinfecte les tongs et les sandales qu’il a récupérées. Il les lave et les trie par couleur, puis il passe au découpage.
Il les coupe, les colle, dessine sur un tissu en jean dès qu’il arrive dans son atelier pour créer de véritables œuvres recyclées. Ces tas de déchets sont un trésor pour l’artiste. II leur redonne une nouvelle vie. C’est une manière de faire face à la pollution de l’environnement.
« Ces tongs que j’ai ramassées ont été portées par des personnes qui ont laissé leurs traces, leur histoire, leur ADN. Alors en les réutilisant pour en faire des portraits, c’est comme si je faisais revivre, je donnais une nouvelle vie à chaque paire de tongs, comme si une personne vivait en réalité à travers ces tongs », raconte-t-il.
Les lettres qu’il utilise forment des mots dans sa langue maternelle ou encore en noussi qui est l’argot ivoirien ou dans d’autres langues. « C’est une manière pour moi aussi de porter un regard sur l’écriture », dit-il.
Aristide Kouame crée des toiles vendues pour environ 1000 dollars par œuvre dans une galerie ou sur Internet. Ses œuvres sont régulièrement exposées en Afrique occidentale et très souvent en Europe dans des galeries d’art.
« Concernant le marché de l’art, je me dis que tout le monde est ma cible parce qu’il s’agit ici de sensibiliser le plus de personnes possible, il s’agit de toucher tous les âges. Je suis un idéaliste, j’aspire à un monde idéal, à un monde où il fait bon vivre. Je me dis que c’est un mauvais choix de dégrader nos plages parce que nous vivons dans un environnement, que, si nous n’en prenons pas soins, nous n’allons pas quitter pour aller vivre sur une autre planète », souligne-t-il.
Une certitude pour le futur, les matériaux qu’Aristide Kouamé a choisi de travailler ne manqueront probablement pas. Parce qu’environ 13 millions de déchets plastiques sont jetés dans les océans de la planète chaque année, selon l’ONU.
En Afrique, le Ghana et le Nigéria, ces deux pays qui sont parmi les principaux pollueurs en Afrique de l’ouest, partagent le même littoral que la Côte d’Ivoire.
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